Vitraux remarquables en Argonne2021-09-22T18:56:23+02:00

Vitraux remarquables en Argonne

Un circuit – Cinq thématiques

Nous avons établi un code couleur qui vous permettra de reconnaitre tout au long de notre circuits, les grandes époques concernées :

Moyen-âge et Renaissance

Les églises et chapelles d’Argonne ont subi au cours des siècles les passages des invasions, les conflits armés dont les deux dernières guerres mondiales, les exactions et pillages de bandes armées, la Révolution Française…et l’usure du temps.  Les bâtiments ont souffert et le mobilier plus encore. Il subsiste peu de vitraux datant de ces périodes. Ils n’en sont que plus précieux.

Nous nous sommes interrogés sur la provenance du verre de ces vitraux, particulièrement ceux de l’église abbatiale de Lachalade dont les abbés possédaient des verreries à proximité. Des études et analyses sont en cours pour tenter de savoir si les verreries forestières ont produit le verre utilisé pour les verrières de l’abbaye.

Les sites

Belval-en-Argonne (51)   – Habituellement fermée, hormis Journées du Patrimoine si elle figure dans la carte des sites Circuit Vitrail de l’année

Lachalade (55) – église abbatiale ouverte tous les jours

Vitraux commémoratifs

Nous avons recensé, sur le territoire du Pays d’Argonne, 32 églises ou chapelles abritant ou ayant abrité des vitraux commémoratifs de la Guerre 14-18.

Les « frontières » de ce pays ne sont pas toujours évidentes : fallait-il s’arrêter à celles imposées par la géographie physique (massif de gaize, la roche locale et ses marges d’argile et de sables, vallées…) ? Ou admettre l’inclusion de communes qui sont administrativement dans des regroupements de collectivités nommés « d’Argonne » ? Ou encore qui se revendiquent d’une appartenance à cette entité ? Nous avons peut-être fait des oublis ou peut-être intégré certaines communes abusivement aux yeux de certains. Les vitraux repérés sont eux bien réels et méritent le détour.

Commentaire Cette carte a été élaborée à partir des importants travaux d’inventaire, d’étude de contenu et de contexte conduits dès 1998 par les Musées de la Meuse, puis en 2004 par les Archives départementales des Ardennes. Ils ont donné lieu à des publications de référence et des expositions. L’inventaire n’a pas été fait dans l’Argonne marnaise. Les apports permettant de l’enrichir seront bienvenus.

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A ce jour, 46 vitraux commémoratifs de la guerre 1914-1918 ont été dénombrés dans 32 localités en Argonne. Dix églises où ils sont installés (un tiers des localisations) avaient été détruites pendant la guerre et été reconstruites en totalité. Cinq autres ont été plus ou moins gravement endommagées et ont été partiellement réhabilitées, la plupart du temps dans le respect de la forme architecturale précédente. La majorité des reconstructions a été faite avec des matériaux nobles et un souci esthétique évident. Les nouveaux vitraux ont été installés en partie seulement grâce aux dommages de guerre, insuffisants pour faire face à cette dépense,  et surtout grâce à l’élan de générosité de nombreux donateurs.

La répartition des localisations est inégale : 10 dans les Ardennes, dont 3 où les vitraux ont été détruits en 39-45, 5 dans la Marne, 17 dans la Meuse ; celle des verrières également : un vitrail dans la plupart des  églises, plusieurs comme à la Harazée et la chapelle de Clermont en Argonne, ou un vitrail inséré dans un un véritable ensemble comme à Condé-les Autry…

Y figurent des vitraux commémoratifs de deux autres guerres qui ont aussi affecté durement l’Argonne et ses habitants. La paroisse de Hans dans la Marne avait amorcé ce mouvement mémoriel avec un très bel ensemble de vitraux réalisés après la guerre franco-prussienne de 1870-1871. Après la Deuxième Guerre mondiale des vitraux modernes ont  été installés, au moins dans dans deux églises, à Apremont et Exermont dans les Ardennes.

Cent ans après la fin de la guerre, ce patrimoine est un peu oublié, parfois en mauvais état. Peut-être pouvons nous contribuer, par un regard renouvelé et l’intérêt porté, à susciter leur mise en valeur et leur conservation ?

Ouvrages de référence

  • Monuments de lumière, Editions Musées de la Meuse, 1998

  • Images de verre, images de guerre, Editions Archives départementales des Ardennes 2004

  • Les églises des reconstructions des Ardennes – Le renouveau de l’Art sacré au XXe siècle,  Michel Coistia, Jean-Marie Lecomte, Editions Noires Terres, 2013

Éléments symboliques

Les représentations des vitraux utilisent des symboles visant, dans les premiers temps, à enseigner, à édifier par l’exemple (sorte de catéchisme en images). Avec le renouveau de l’art sacré, les vitraux sont moins figuratifs. Ils sont conçus avec une dimension plus esthétique, touchant au mystère, à l’absolu. Leur création est davantage libérée de la tutelle et des enseignements de l’Église.

L’église propose des images permettant une réconciliation avec la nation laïque à travers quelques figures religieuses patriotiques, notamment Jeanne d’Arc canonisée en 1920. Certains vitraux mélangent plusieurs inspirations : deuil et héroïsme, reconnaissance et douleur, Dieu, la Patrie et la Famille…

L’image de la France victorieuse, l’invocation Dieu et Patrie (Beauzée-sur-Aire,Bulainville, Fleury-sur-Aire font écho au « Gott mit uns / Dieu est avec nous » des Allemand. « A Florent-en-Argonne (51), deux vitraux commémorent les terribles combats de 1915 avec une lutte symbolique du Bien contre le Mal : l’archange Saint Michel combattant Satan et Saint Georges terrassant le Dragon.

Dans un registre plus explicite, on trouve le surprenant vitrail de Senuc (08) où, à la demande du maire, le soldat romain qui décapite St Oricle, porte casque allemand.

A Condé-les-Autry, Marie, la mère du Christ, reçoit en ses bras la dépouille de son fils. Son voile est de couleur bleu horizon, de même tonalité que l’uniforme des poilus en arrière-plan. On voit aussi une ou des femmes en prière devant le Christ (Beauzée-sur-Aire), des enfants pleurant leur père (Clermont-en-Argonne). Dans le vitrail intitulé « Soir de deuil glorieux » (Avocourt), deux anges apportent une brassée de palmes sur les tombes d’un cimetière militaire.

Ce thème est très fréquent : le peintre-verrier figure le poilu béni par le Christ sur le champ de bataille, recevant la palme du martyre des mains de la Vierge ou d’un ange descendu du ciel… Dans une optique catholique, le soldat croyant offre sa vie en sacrifice afin de sauver sa Patrie, suivant ainsi le Christ qui a offert la sienne pour sauver le monde. Celui qui a donné sa vie recevra le Paradis en guise de récompense céleste.

Dans certains vitraux, les verriers assimilent les souffrances du combattant à celles du Christ : les outils de la Passion (clous, tenaille, lance, épines) sont parfois représentés ( Condé-les-Autry, dans plusieurs vitraux sur fond géométrique). Les barbelés évoquent la couronne d’épines. Les soldats, souvent en prière, évoquent les anges orants fréquents dans l’iconographie religieuse (Condé-les-Autry).

 

En premier plan, les infirmières et infirmiers sont distingués, dont la célèbre Sœur Gabrielle (Chapelle de l’Hospice de Clermont-en-Argonne), ainsi que les aumôniers militaires et les religieuses. Les religieuses soignent. Les aumoniers prodiguent les derniers sacrements aux soldats mourants (le Père Delawoëvre, ancien curé et aumonier d’Avocourt, un aumonier, Chapelle et Eglise de Clermont-en-Argonne).

 

Dans de nombreux vitraux figure la liste de noms des victimes de la commune ou de la paroisse ou une dédicace à un ou plusieurs morts, le plus souvent liée à un financement de la famille. La personnalisation est renforcée par l’usage de photographies (Avocourt, Bulainville, Epinonville, , Esnes-en-Argonne, Fleury-sur-Aire, Chapelle de l’Hospice de Clermont, Florent-en-Argonne, Tailly et dans une chapelle funéraire à Triaucourt). La fraternité au combat est aussi présente dans les hommages rendus par les survivants.

 

Des éléments nombreux l’évoquent, quel que soit le style des vitraux : Pax (Sivry-les-Buzancy), Notre Dame de la Paix (Cornay), colombe portant un rameau d’olivier (Ballay). L’aspiration devenait d’autant plus vive que les dangers d’un nouveau conflit majeur se faisaient sentir. L’espérance, fondée sur les valeurs de la Société des Nations créée en 1920, était vivace. Elle a été renforcée par le rassemblement universel pour la paix de 1935.

 

Des paroisses ou des anciens combattants, ont exprimé leur soulagement d’avoir échappé à la destruction, à la mort. A Fleury-sur-Aire, l’inscription « Hommage à la très sainte Vierge pour sa protection pendant la Guerre » accompagne un soldat vainqueur agenouillé devant Notre Dame des Victoires, à Nubécourt, un soldat est agenouillé devant Notre Dame des Victoires.

Mais la reconnaissance va surtout, explicitement et en écho avec le monument aux morts de la place publique, à ceux qui se sont battus ainsi :  » Aux enfants de Lavoye morts pour la Patrie, les anciens combattants, leurs familles, leurs compatriotes « .

 

Jeanne d’Arc devient une figure de l’héroïsme au service de la Patrie. On la voit conduisant des soldats à l’assaut, victorieuse avec l’allégorie de la France (Bulainville, Chapelle de l’Hospice – Clermont-en-Argonne, Thénorgues, Triaucourt…).

Les saints patrons des églises sont représentés : St Martin, patron de plusieurs églises, est représenté aussi parce que d’abord soldat et que sa fête coïncide avec l’armistice. St François d’Assise, patron de l’église (Le Neufour,55), apparaît au soldat mourant.

Les saints portant le prénom de soldats tués à la guerre ont aussi représentés sur les vitraux dédiés : ainsi St Etienne et St Marcel, à Esnes en Argonne, sont figurés sous les traits des fils de Mr et Mme Auger.

 

Saints argonnais

Avant que l’écriture ne se diffuse,  le vitrail a une fonction d’édification : donner l’exemple au peuple des fidèles, entretenir la foi et la confiance en ces grandes figures consacrées. L’église est toujours dédiée à un saint dont on espère qu’il apporte ainsi la protection à la communauté. Celui-ci est très souvent figuré dans les vitraux de l’édifice religieux.

Les croyants attendent aussi que ces vitraux représentent des saints particulièrement vénérés. A ce titre la figuration de saints « locaux » est souvent  demandée. On trouve ainsi en bonne place Saint Baldéric, Saint Juvin, Sainte Menehould, Saint Oricle, Saint Rouin.

Brève chronique de leur vie

Baldéric était un prince mérovingien. Il serait le fils de Sigisbert 1er, roi d’Austrasie et aurait quitté la cité royale de Reims avec une de ses soeurs pour se réfugier dans les solitudes boisées de l’Argonne. Cherchant un lieu pour édifier un oratoire, il fut guidé vers la butte de Montfaucon par un faucon, souvent figuré avec le saint. Aidé de ses disciples, il défricha le sommet et les flancs de la butte, ce qu’évoque la hache, souvent aussi figurée. Il fonda ensuite l’abbaye de Monfaucon.

Figure dans les églises paroissiales de Montfaucon d’Argonne (55), Romagne-sous-Montfaucon (55), Septsarges (55)

Basle était moine et ermite à Verzy (Marne) où il mourut vers 620. Missionnaire itinérant, il est réputé  évangélisateur à Dombasle et en Lorraine. Il  séjourna ici près d’une source qui portera ensuite son nom.

Figure dans l’église paroissiale de Dombasle-en-Argonne

Juvin, né vers 897, est porcher au service du comte Marc de Dormois à proximité de ce qui deviendra le village de Saint Juvin . Sa profonde dévotion l’amène à construire un oratoire en bordure de l’Aire où il vient prier souvent. Soupçonné, de ce fait,  de négliger son travail, il invoque le soutien divin. En réponse, plusieurs miracles convainquent le comte Marc de sa sainteté. Il l’affranchit alors et l’autorise à se consacrer à sa vie d’ermite jusqu’à sa mort en 961. Juvin est  inhumé à proximité de son oratoire transformé en église par la comtesse Julie. Durant le Moyen-âge, un culte se développe autour de sa dépouille. Le saint est invoqué contre les maladies des porcs.

Figure dans l’église fortifiée de  Saint Juvin (08)

Menehould se distingua par sa bonté et son dévouement aux malades. On lui attribuait d’avoir, par ses prières écarté la ville des ravages des Huns d’Attila.

La réputation de la sainte était grande. Jehan de Saulx, seigneur de Cernon et sa femme ramenèrent en 1379 des reliques : un os du bras et une côte, déposés dans un reliquaire. Celui-ci fut détruit à la Révolution mais quelques ossements furent sauvés et déposés dans un nouveau reliquaire maintenant présenté dans l’église Saint-Charles.

Figure à  Sainte Menehould (51) dans  l’église du Château et à l’église Saint Charles

Oricle, disciple de St Nicaise, évêque de Reims et martyr, aurait été massacré par les Huns au Ve siècle, avec ses sœurs Oricule et Basilique. Selon la légende, le saint, décapité lava sa tête à une fontaine qui devint un lieu de pèlerinage et qu’on identifie aujourd’hui au lavoir du village de Senuc. Puis, sa tête entre les mains, il gagna le tombeau qu’il s’était d’avance préparé.

Figure dans les églises paroissiales de Clermont-en-Argonne (55), Senuc (08)

St Rouin, moine ermite est le fondateur de l’Abbaye de Beaulieu-en-Argonne au VIIe siècle.

Figure dans les églises paroissiales de Brizeaux (55), Lavoye (55), Les Charmontois (51)

Renouveau de l’Art Sacré

La création des vitraux est marquée par deux grandes tentatives antagonistes : celle de retrouver le style et les images d’avant-guerre et l’autre, de profiter de la reconstruction et de l’ampleur des chantiers, pour renouveler l’iconographie et utiliser d’autres techniques, d’autres langages artistiques. Parfois elles coexistent;

La reconstruction apporte un nouveau regard sur la conception des bâtiments comme des verrières qui les ornent. L’Eglise catholique, timidement d’abord, puis résolument, s’inscrit dans la modernité de son temps, en rupture avec l’architecture religieuse traditionnelle. Une même volonté se diffuse : émouvoir plutôt qu’instruire, proposer des lieux de culte simples et beaux, propices à la méditation, inviter à la spiritualité plutôt qu’offrir des images trop narratives, associer lumière et architecture. Les vitraux ont contribué grandement à rendre cette démarche sensible et accessible.

Une commission diocésaine d’Art sacré veille à ce que soient respectées les formes acceptées par la tradition chrétienne ainsi que les règles de l’art sacré. Les débats sur l’adaptation aux expressions artistiques modernes sont vifs entre ces commissions, l’Union nationale qui les réunit et les coopératives de reconstruction.

« Après la guerre, les grands ateliers tournent à plein, reproduisant en de nombreux exemplaires des vitraux souvent médiocres illustrant une thématique à la mode de l’époque : Jeanne  d’Arc, le Sacré-Cœur, la Rédemption, la Résurrection« 

Michel Coistia, Jean Marie Lecomte, Les églises des reconstructions dans les Ardennes,le renouveau de l’Art sacré au XXème siècle, Ed Noires Terres, 2013

Les artistes engagés dans ce mouvement veulent rompre avec le néo-médiéval ou néo-classique dominant dans les constructions et les vitraux du 19e siècle. Ils veulent renouer avec l’authenticité, utiliser des matériaux bruts, sans fioritures. Ils utilisent moins la grisaille. Pour les vitraux ce sera le retour au verre teinté dans la masse dit « antique », l’utilisation de verres imprimés comme le verre cathédrale, un réseau dense de plomb, des créations originales pour chaque commande, un graphisme épuré, des fonds non figuratifs, des  inspirations plus symboliques…

Peintres et maîtres-verriers sont associés dans le processus de création qui porte ce renouveau du vitrail. Le plus souvent les peintres, formés aux Beaux-Arts, réalisent des cartons qu’ils font exécuter dans les ateliers verriers.

. Ils travaillent dans une même ambition artistique avec les architectes, sculpteurs, mosaïstes, ferronniers d’art et autres disciplines à l’oeuvre dans l’art sacré. Ainsi, à Ballay, l’atelier Simon, sur le thème des Litanies de la Vierge, a utilisé formes géométriques, stylisation des personnages, en cohérence avec l’architecture de l’église, son aménagement et sa décoration intérieure.

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